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Les droits dans l’hindouisme

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Contrairement à une perception populaire, les philosophies hindoues de moralité, de devoir et de vérité universelle cohabitent avec les valeurs des droits de l’homme. Une réponse à Larry Cox. EnglishEspañolالعربية


Arvind Sharma
24 April 2014

Il est souvent avancé, de manière directe ou par des insinuations, que l’hindouisme et les droits de l’homme sont antagonistes, que leur seule relation possible est celle d’une opposition diamétrale, et que la hiérarchie du système des castes sur laquelle repose l’hindouisme ne laisse aucune place pour l’égalité qui sert de base aux droits de l’homme.

Une telle façon de voir semble être toute aussi partiale qu’erronée. Elle peut contenir une certaine part de vérité dans des cas particuliers mais ne devrait pas obscurcir la réalité plus large de l’hospitalité de l’hindouisme envers les droits de l’homme. Comme Larry Cox l’écrit dans son article, il est tragique de supposer que les droits de l’homme et la croyance religieuse sont toujours en conflit, en particulier quand les valeurs morales de dignité sont en grande partie le fondement des traditions religieuses.

La tradition hindoue, en particulier, contient divers récits de l’origine du système des castes. Le plus connu d’entre eux est dans le Purushasukta du Rigveda, qui explique que l’univers fut créé à partir d’un seul homme cosmique (Purusha) quand son corps fut offert au cours du sacrifice primordial. Les quatre varnas ou classes vinrent de sa bouche (prêtre), de ses armes (guerrier), de ses cuisses (paysan) et de ses pieds (serviteur).

Une origine moins connue du système des castes se trouve dans le Brihadaranyaka Upanishad, le plus grand des Upanishads. D’après ce récit, il y avait à l’origine Une Vérité, Brahman. Elle ne s’épanouit pas d’elle-même alors elle créa les brahmanes, ou prêtres. Elle ne s’épanouit toujours pas alors elle créa les Kshatriyas, les guerriers. Elle ne s’épanouit toujours pas, alors elle créa les Vaishyas, les paysans. Ne s’épanouissant toujours pas, elle créa les Shudras, les serviteurs.

Ensuite elle réfléchit. Le Kshatriya doit tous les protéger mais le Kshatriya a tendance à être importun. Alors, afin de tous les protéger, elle créa la Dharma, la religion, ou des préceptes et une éthique permettant à l’univers de prospérer. C’est le Dharma qui permet au faible de l’emporter sur le fort. Si ce n’est pas le concept des droits individuels de l’homme en tant que protection contre le pouvoir de l’État alors qu’est-ce donc ? En Occident, ce droit bénéficie d’une base juridique et morale, mais dans ce passage, il est identifié avec la vérité et attribué une base ontologique et donc encore plus solide, en étant enraciné dans la conscience plutôt que dans une imminence. 

Un second exemple qui démontre la sympathie de l’hindouisme envers les droits de l’homme est fourni par le Taittiriya Upanishad, dans lequel Sankara commente sur ce qui constitue l’unicité des êtres humains en comparaison avec d’autres formes de vie. Sankara maintient qu’un être humain diffère des animaux car il possède la capacité pour la connaissance (Jnana) et l’action (Kriya). En bref, la singularité d’un être humain vient de sa moralité. 

Ce caractère moral implique des obligations et des droits fondamentaux. Il devient ensuite obligatoire pour la société et l’État de préserver des conditions de vie permettant à l’être humain d’exercer sa moralité en ayant la capacité de revendiquer des droits et de s’acquitter d’obligations.

La troisième ressource positive pour les droits de l’homme au sein de l’hindouisme est une  référence à la conception des trois dettes et son extension dans le Mahabharata. La loi hindoue fait référence aux dettes qu’une personne a envers les Dieux, les sages et les ancêtres et celles-ci sont respectivement acquittées via la pratique religieuse, l’étude des écritures et le commémoratif appelé le Shraddha. A celles-ci, le Mahabharata ajoute une quatrième : la dette que nous avons envers tous les êtres humains, qui est alors une dette que tous les êtres humains ont les uns envers les autres, un concept qui réside au cœur des droits de l’homme, car ces droits sont ceux de chaque être humain envers tous les êtres humains. 

 

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Indian Hindu devotees take holy offerings as they visit to pay obeisance in a temple Sanjeev Syal/Demotix. All Rights Reserved.

La quatrième source réside dans le concept des devoirs qui est si caractéristique de l’axiologie hindoue. Un peu de réflexion révèle que les devoirs d’une partie coïncident souvent avec les droits d’une autre partie. Ainsi un être humain a le droit à la sécurité personnelle que l’État a pour devoir d’assurer. 

C’est cette convertibilité de l’idiome devoirs - droits qui explique peut-être ce changement facile et rapide de discours allant des devoirs aux droits en Occident, par exemple dans le mouvement des droits civils aux États-Unis comme le fait remarquer Cox. Un changement facile et rapide similaire peut s’observer en Inde. Au début du 19è siècle, le réformateur social et religieux Raja Ram Mohan Roy parlait aisément des droits des femmes en Inde.

Une cinquième source est fournie par les mythes hindous comme l’histoire de King Shibi. Alors qu’il se trouvait un jour dans la cour, un moineau qui était pourchassé par un faucon chercha refuge sur ses genoux. Le faucon réclama le moineau au roi car celui-ci constituait son moyen de subsistance. Acceptant le droit du faucon, le roi offrit sa propre chair afin de remplir son devoir de protection envers ses sujets.

Ce qui est maintenant appelé droits de l’homme peut être identifié dans les écritures hindoues du domaine philosophique au domaine populaire. La cause consistant à promouvoir les droits de l’homme est mieux servie en identifiant ces éléments au sein de l’hindouisme, plutôt que dans sa condamnation générale et sans discernement. Ce n’est pas pour dénier que l’hindouisme puisse contenir des éléments opposés aux droits de l’homme, mais pour remettre en question la notion selon laquelle l’hindouisme est complètement incompatible avec les droits de l’homme.

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